Urumea, Le mont Urgull, l’île Santa Clara, les galères, la Plaza vieja, la Plaza de la constitucion, les sandias, la mairie

Nous voici arrivés au pont de bois qui traverse l'Urumea. St-Sébastien est pittoresquement situé sur un isthme, au pied du mont Urgull. Cette ville est flanquée de deux baies assez grandes : l'une à l'orient, protégée par l'île de Santa Clara, et l'autre au nord. La première a un mouillage dangereux, et les quelques navires qui arrivent dans ce port, sont obligés d'entrer dans un petit bassin protégé par des môles(1), et qui reste à sec à marée basse ; la seconde est impraticable à cause de la barre de l'Urumea. Quelquefois, il arrive que les marins qui ne connaissent point ces parages viennent se perdre sur la barre, tandis qu'ils eussent trouvé de l'autre côté une entrée facile. Lorsque les mauvais temps règnent, les vagues viennent se briser avec furie contre les remparts, et interrompre la promenade ainsi que le chant plaintif de la sentinelle. En suivant le chemin des piétons qui borde ce fossé dans lequel nous voyons des soldats et des enfants jouant à la pelote, nous arriverons plus tôt.

Rangeons-nous ; laissons passer sous la voûte cette espèce de maison en natte appelée galère(2). Elle emporte de la ville tout ce que ses flancs peuvent contenir de marchandises ; de plus, voyez ces matelas et ces braves gens qui s'installent dessus comme ils le feraient chez eux. Les pauvres diables disposent leurs logis le plus confortablement possible; ils arriveront à Madrid ou plus loin encore, accompagnés du même conducteur et du même attelage. Remarquez aussi ce chaudron tout noir, attaché derrière la galère : la batterie de cuisine n'est pas oubliée. Sur la route, ce sera pour eux un meuble bien utile. Entre les deux roues, sous la voilure, il y a lin filet qui sert de lit au chien de garde, compagnon fidèle de la lourde machine.

Nous sommes enfin sur la Plaza Vieja où viennent stationner les diligences et les arriéras, etc. En visitant la ville, nous trouverons les rues d'une régularité parfaite. Les maisons se ressemblent presque toutes; les magasins seuls modifient leur physionomie.

Entendez-vous ce tapage, ces voix féminines parlant sur tous les tons. Nous approchons de la Plaza de la Constitucion; vous l'apercevez déjà derrière cette arcade. De ce côté de la place se tient le marché. Là se trouvent entassés les raisins noirs de Navarre, si gros et si veloutés ; les sandias à la chair d'un rose vif et aux pépins de geai ; le gros cédrat à côté de cet énorme piment, brillant du plus pur vermillon; et ces melons à la peau verte, lisse et délicate. Nous retrouvons un peu sur le marché la couleur de l'Espagne du Midi ; ces arriéros en font foi.

Passons devant la maison de ville (Casa de la villa). Elle est fort belle; son architecture est moderne et d'un bon style. Gagnons les arceaux où se trouvent des magasins ; c'est là que se promène le soir le monde élégant.

 

(1) Ces môles ont été construits sous Charles-Quint.

(2) C'est une charrette à deux roues, sans fond ni plancher. Dans la partie inférieure, une espèce de filet sert à recevoir les ballots, les malles et les matelas. Le dessus est couvert avec des roseaux et de la toile.

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