Le château-neuf, l’arsenal,  la rue Pannecau, la Nive, l’Adour, les tillolles, les galupes, la fontaine Saint-Léon, fontaine de Lissague

En rentrant en ville, passons devant le Château-Neuf, construction qui porte difficilement son nom avec ses murs noirs et humides. Les grosses tours que vous voyez n'ont été achevées qu'en 1489, sous Charles VIII. En démolissant les fondements d'une petite fortification qui liait ces deux tours, on trouva une médaille sur une des faces de laquelle étaient les armes et la devise de la ville (Nunquam polluta), ainsi que la date de 1480. L'origine de cette devise est restée jusqu'à présent inconnue.

L'Arsenal de Bayonne ne manque pas d'intérêt et mérite d'être visité : la salle d'armes est une des plus belles de France. Ce quartier est peu brillant, mais la rue si populeuse de Pannecau nous conduit à la cale où nous attend un batelier.

D'ici nous apercevons les deux ponts et la passerelle qui relient le Petit Bayonne au Grand. La Nive, qui traverse la ville dans toute sa longueur, va mêler ses eaux à celles de l'Adour, au pied des fortifications du Réduit. Cette première rivière est sillonnée de bateaux dont les formes ne manquent pas de pittoresque.

Dans ce bateau ponté, dont la construction massive rappelle l'arche de Noé, grouillent et glapissent à la fois, hommes, femmes, enfants, veaux, poules, cochons, etc. Après avoir passé la nuit sur le fleuve, il va redescendre la Nive ce soir, remontera l'Adour, et, le vent aidant, il arrivera à Dax, Came ou Peyrehorade. L'intérieur de ce bateau est vraiment curieux : des passagers, les uns chantent, les autres jouent aux cartes, quelques-uns, et ce sont les richards, sont étendus mollement et pêle-mêle sur des matelas, quelquefois entassés comme des marchandises; les femmes filent ou tricotent. Fort heureusement, la pudique lanterne veille sur la conduite de ce tohu-bohu.

A l'aspect de cette barque longue, étroite, et plus semblable à une pirogue d'Indien qu'à un bateau ordinaire, vous vous croyez transporté sur quelque fleuve d'Amérique. En voici une qui arrive de Cambo ; un seul homme la conduit, elle est pour tant bien chargée de kaolin et de paquets. Elle a descendu ce matin les nasses avec la rapidité d'une flèche; elle est venue en deux heures, et il lui en faudra six ou sept pour remonter.

Ces autres barques, formant éventail à l'avant et à l'arrière, ce sont des tilloles : elles sont fort antiques et essentiellement bayonnaises. La tillole et le tillolier sont chantés dans les refrains populaires. Le batelier est seul; voyez avec quelle facilité il fait mouvoir ses rames, en croisant un bras sur l'autre à l'arrière de sa tillole.

Ces grands bateaux plats, dont l'avant est relevé en pointe et dont l'arrière est carré, surmonté d'une rame de quelques mètres de longueur, ce sont les galupes de Mont-de-Marsan: c'est le roulage par eau.

Faut-il un autre aliment à votre curiosité? Remontons la Nive, suivez-moi vers ce dôme que vous apercevez sur notre droite et que couronne une petite croix : c'est la fameuse fontaine de saint Léon, dont je vous ai fait connaître la légende(1).

Traversons la rivière, et maintenant que vos yeux se sont suffisamment arrêtés sur ce monument, suivons ce petit sentier, et nous arriverons à cette fontaine de Lissague si fraîche, si ombragée, où s'est passé le drame terrible du combat de Belsunce dont la légende vous est connue(2).

Votre curiosité est-elle satisfaite ? Redescendons alors la Nive et débarquons au port au grain ; cette rue ne manque pas d'originalité avec ses auvents, ses maisons à pans de bois, et le clocher qui la couronne.

 

(1) Voir document intégral, page 2.
(2) Voir document intégral, page 6.