Costumes basques, espadrilles, makhila, l’établissement de bains, l’eau ferrugineuse
Le cocher s'est rafraîchi. Nous avons à gravir la côte de Cambo; elle est très-fatigante, c'est pour cela que nous avons fait une petite halte. Mais le bruit du fouet nous annonce l'arrivée à notre destination; cette allée couverte nous conduit à Cambo.
Cette petite ville est bâtie sur une plate-forme qui domine le Bas-Cambo dont la Nive la sépare. Pittoresquement placée à quelques kilomètres de la montagne, entourée de beaux tapis de verdure, de jolies collines, de magnifiques promenades, l'air qu'on y respire est si pur, qu'il doit contribuer pour beaucoup aux cures tant vantées des eaux de cette localité. Ses habitants se reconnaissent facilement à leur air de santé ; leur démarche fière et dégagée semble avoir conservé toute la hardiesse des Cantabres d'autrefois.
Remarquez ce jeune Basque cheminant la main passée autour de la taille de sa compagne : c'est sans doute sa fiancée ; et ce pâtre à la dalmatique noire, au capuchon pointu et aux ailes tombantes; ce charretier qui l'accompagne, chaussé de bas de laine brune dont la bordure s'élargit sur les sabots. Les costumes des jeunes gens qui les suivent sont plus élégants : berrets bleus, vestes de velours, espartilles et le maquila(1) national. Ces femmes avec leurs mantelets noirs se rendent â l'église. Tout nous dit que nous sommes parvenus aux premières assises de la montagne. Ce qui nous confirme plus encore que nous entrons dans les Pyrénées, c'est cette physionomie franche et ouverte qui vous annonce que vous serez le bienvenu sous le toit du montagnard. Cette hospitalité dont vous serez à même d'apprécier la cordialité, rappelle les mœurs patriarcales.
Cambo reçoit deux fois par an des étrangers, et, comme Biarrits, se change en une petite ville élégante. Le zèle infatigable et bien entendu de M. Fagalde, propriétaire de l'établissement des bains; les soins intelligents dont il fait preuve pour prévenir les moindres désirs de ses pensionnaires et leur procurer tout ce qui peut les distraire, ajoutés à la bonté des eaux thermales de Cambo, attirent d'année en année un plus grand nombre de voyageurs; aussi celte petite ville ne peut-elle que grandir en réputation.
L'établissement des bains est heureusement placé au bord de la Nive. Sa forme particulière, qui lui donne une certaine ressemblance avec un petit temple, contraste singulièrement avec le site qui l'avoisine. Onze cabinets occupent le pourtour d'une demi-rotonde; la fontaine d'eau sulfureuse est en face de la rivière, sous une galerie. On raconte que la veille de la saint Jean, à minuit, bon nombre de Basques et de Basquaises des alentours, viennent aux deux sources minérales faire provision de santé.
En suivant la Nive, de belles allées d'arbres conduisent à la source ferrugineuse qui est placée sous un petit pavillon soutenu par quatre colonnes. L'eau sulfureuse a un goût semblable à celui d'œufs couvés; sa température varie de 22 à 25 degrés centigrades ; elle perd promptement ses propriétés sulfureuses, et ne se conserve qu'hermétiquement bouchée ; la lumière ne l'altère pas.
« L'eau ferrugineuse de Cambo, dit M. Salaignac, est limpide et incolore ; d'une saveur qui annonce la présence du fer et qui n'est point acidulé. La température de cette eau est de 15 à 16 degrés centigrades. La pesanteur spécifique n'est presque pas sensible à l'aéromètre de Baumé, ce qui démontre qu'elle ne contient que très peu de substance saline. »
(1) Bâton de néflier garni de fer à son extrémité.